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fort imparfaite, se maria à 18 ans avec une femme qui avait huit ans de plus que lui, mena une vie assez vagabonde, fut forcé à 22 ans de quitter son pays parce qu’il était poursuivi comme braconnier, vint à Londres, où il se trouva, dit-on, réduit pendant quelque temps à garder les chevaux à la porte d’un théâtre ou à faire le métier de souffleur, puis monta sur la scène, où il ne joua d’abord que des rôles secondaires, et enfin se fit auteur. Il commença par retoucher et arranger pour la scène de vieilles pièces, puis il se mit à en composer d’originales. Ses premières productions de ce genre paraissent dater de 1589. Il acquit bientôt une réputation immense comme auteur et comme acteur (il réussissait surtout en jouant ses propres pièces), attira l’attention de la reine Élisabeth et de Jacques I, et reçut les libéralités de plusieurs grands seigneurs, entre autres du comte de Southampton. Il finit par devenir propriétaire directeur du théâtre du Globe dans Southwark (faubourg de Londres), fit une assez belle fortune, et put quitter la scène de bonne heure. Il se retira vers l’an 1610 dans sa ville natale, et y acheta, pour y passer le reste de ses jours, la maison où il était né ; c’est là qu’il mourut en 1616, n’étant âgé que de 52 ans. Shakespeare a laissé 35 pièces, dont voici, selon Malone, la liste dans l’ordre présumé de leur composition : Henri VI, en 3 parties (1589-91) ; le Songe d’une nuit d’été (1592) ; Comédie d’erreurs ou plutôt les Méprises (1593) ; la Grondeuse mise à la raison (1594) ; Peine d’amour perdue (1594) ; les Deux seigneurs de Vérone (1595) ; Roméo et Juliette (1595) ; Hamlet (1596), le Roi Jean (1596) ; Richard II et Richard III (1597) ; Henri IV, en 2 parties (1597-98) ; le Marchand de Venise (1598) : Tout est bien qui finit bien (1598) ; Henri V (1599) ; Beaucoup de bruit pour rien (1600) ; Comme vous voudrez (1600) ; les Commères de Windsor (1601) ; Henri VIII (1601) ; Troïlus et Cressida (1602) ; Ruse contre Ruse (1603) ; Conte d’hiver (1604) ; le roi Lear (1604) ; Cymbeline (1605) ; Macbeth (1606) ; Jules César (1607) ; Antoine et Cléopâtre (1608) ; Timon d’Athènes (1609) ; Coriolan (1610) ; Othello (1611) ; la Tempête (1612) ; le Jour des Rois (en angl. Twelfth night, la 12e Nuit, 1614). On lui attribue encore Titus Andronicus et Périclès ; mais les meilleurs critiques s’accordent à penser que ces deux pièces ne sont pas de lui. Ses chefs-d’œuvre sont : Henri IV, Roméo et Juliette, le roi Lear, Macbeth, Hamlet, Othello. On a en outre de lui deux petits poëmes, Vénus et Adonis, l’Enlèvement de Lucrèce, et des sonnets. La plupart de ses pièces de théâtre sont mêlées de prose et de vers. Shakespeare possède toutes les qualités de l’homme de génie : il peint avec énergie et vérité, et soutient admirablement ses caractères ; ses tableaux sont tour à tour terribles et gracieux ; souvent il s’élève au sublime ; il excelle surtout à exciter la terreur ; mais on trouve dans ses pièces de choquantes disparates, des plaisanteries grossières ou ridicules au milieu des morceaux les plus pathétiques, des expressions tantôt triviales, tantôt enflées et guindées, partout enfin les unités de temps et de lieu sont violées. À tous cas titres, Shakespeare est regardé comme le père de l’école romantique. La plupart de ses pièces n’ont été imprimées qu’après sa mort, et elles paraissent avoir subi entre les mains des comédiens et des copistes de graves altérations. La 1re  édit. en fut publiée en 1623, in-fol., par deux comédiens, Hemminge et Condell. On doit à Rowe, 1709, à Pope, 1725, à Warburton, 1744, à Johnson. 1765, à Steevens, 1773, à Malone, 1790, à Is. Reed, 1803, à Collier, 1843, à Knight, 1844, des éditions de plus en plus perfectionnées. Shakespeare a en outre été l’objet d’une foule de commentaires, de notices, de jugements. Ses Œuvres ont été traduites en français par Letourneur, qui se fit aider de Catuelan et Fontaine-Malherbe, 1776-82, 20 vol. in-8 ; par MM. Guizot, de Barante et Pichot (1821, 13 vol. in-8, et 1861-62, 8 vol. in-8) ; par M. Francisque Michel, 1840 et 1860, 3 vol. in-8, avec la Vie de Shakespeare par Woodsworth, et des remarques sur sa vie et ses ouvrages, par Th. Campbell. M. Franç. Vict. Hugo en a donné une nouvelle traduction, 1860-64, 15 vol. in-8. Ducis a reproduit sur notre scène les principales tragédies du poëte anglais. De nos jours, M. Lacroix en a traduit quelques-unes en vers aussi littéralement que possible. On doit à Aug. Guill. Schlegel une traduction allemande fort estimée de plusieurs de ses pièces ; d’autres ont été traduites par L. Tieck. H. et Abraham Voss, J. B. Benda et Wolf de Budissin. M. Villemain a donné un Essai sur Shakespeare ; J. Halliwell une Vie de Shakespeare, 1847 ; M. Mézières, Shakespeare, ses œuvres et ses critiques, 1860.

SHANGHAÏ, forme anglaise de CHANGHAÏ.

SHANNON, Senus, riv. d’Irlande, naît dans le comté de Cavan, coule au S. et au S. O., sépare la province de Connaught de celles de Leinster et de Munster, entre dans celle-ci, se dirige à l’O. S. O., et tombe dans l’Océan Atlantique par la côte occid. de l’Irlande entre le cap Kerry et le cap Loop ; cours, 390 kil. Ce fleuve arrose Carrick, Jamestown, Limerick, forme plusieurs lacs et reçoit de nombreux affluents (la Boyle, le Fergus, la Brosna, l’Askeaton, etc.). Il communique par le grand canal avec la mer d’Irlande. Pêche abondante, gros brochets, etc. — La famille Boyle porte le titre de comtes de Shannon.

SHARP (James), prélat écossais, né en 1618 dans le comté de Banff, avait été longtemps zélé presbytérien ; il se rallia ensuite à l’église anglicane, et fut nommé archevêque de St-André. Chargé avec le comte de Middleton d’organiser le gouvernement de l’Écosse, il s’acquitta de ses fonctions avec une extrême rigueur, et causa ainsi la révolte de 1666. Consigné dans son diocèse en 1667, quand le gouvernement prit une marche impartiale, il n’en fut pas moins l’âme du parti violent qui s’opposait à toute transaction ; il finit par être égorgé en 1679 par des fanatiques.

SHARP (W.), un des plus habiles graveurs anglais (1749-1824), grava d’après les grands maîtres italiens et anglais. Il avait adopté les rêveries de Svedenborg, et fut dupe de plusieurs fanatiques. On vante surtout sa Pythonisse d’Endor, sa Ste Cécile, son Lear au milieu de la Tempête, son Diogène, etc.

SHARP (GRANVILLE). V. GRANVILLE-SHARP.

SHAW (Thomas), voyageur anglais, né vers 1692, à Kendal (Westmoreland), m. en 1751, était ministre anglican. Nommé chapelain du comptoir d’Alger, il visita pendant 12 ans l’Afrique septentrionale, la Syrie, l’Égypte, et en rapporta des médailles, des antiquités et des objets d’histoire naturelle. On a de lui un ouvrage instructif et intéressant : Voyages et observations relatives à plusieurs parties de la Barbarie et du Levant, Oxford, 1738 (trad. en franç. La Haye, 1743).

SHAW (Pierre), médecin anglais, né vers 1595, m. en 1763, publia en 1725 les Œuvres de Robert Boyle disposées méthodiquement, 3 vol. in-4, et fit en 1733 un travail semblable sur Franç. Bacon, 3 vol. in-4. Il ouvrit des cours de physique et de chimie à Londres, et devint médecin du roi George II. Ses Leçons de Chimie ont été trad. par Mme d’Arconville, 1769.

SHAW (George), naturaliste, ne en 1751 à Bierton (Buckingham), m. en 1813 ; enseigna la botanique à Oxford et devint conservateur de la bibliothèque d’histoire naturelle au Musée britannique (1791), puis conservateur de ce musée. On a de lui une Zoologie générale en 10 vol. (1800-19) et un Abrégé des Transactions philosophiques (1809), 18 vol.

SHEERNESS, v. et port militaire d’Angleterre (Kent), dans l’île de Sheppey, sur la côte N. O. de l’île, à 17 kil. N. E. de Rochester, env. 8000 h. Citadelle ; chantiers de construction ; arsenal et grands magasins maritimes. — Cette ville, fondée par Charles III, fut prise par Ruyter en 1667.

SHEFFIELD, v. d’Angleterre (York), au confluent du Don et de la Sheaf, à 67 k. S. O. d’York ; 60 000 h. (on n’en comptait que 35 000 en 1811). Aux env., mi-