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EXPOSÉ.

est certain. Il l’est aussi qu’il parlait très bien le français : quarante-cinq ans plus tard, sa belle-fille Charlotte le constatait dans une lettre à madame de la Trémoïlle, sa mère. Après notre pays, il en parcourut plusieurs autres, probablement l’Espagne, l’Italie, les lieux saints, Constantinople et la Pologne. Et ces voyages durèrent environ cinq ans.

En 1587, il était de retour dans sa patrie. Les Derby étaient alors, de toutes les grandes familles anglaises, celle qui s’intéressait davantage aux choses du théâtre. Leurs châteaux virent plus de représentations théâtrales que toutes les autres demeures seigneuriales. En ce temps-là, la loi regardait les acteurs comme des vagabonds, à moins que leur troupe n’eût obtenu de quelque grand seigneur le privilège de porter son nom, moyennant quoi elle était considérée comme faisant partie de sa maison. Ce n’était guère là qu’une fiction légale qui n’empêchait pas les troupes comiques de jouer dans toutes les villes qu’il leur plaisait, pas plus que cela n’empêchait leurs protecteurs d’appeler chez eux d’autres compagnies que celles qui se réclamaient d’eux. Non seulement le comte de Derby, mais son fils aîné Ferdinando, lord Strange, frère de William Stanley, avaient chacun une troupe d’acteurs.

Vers 1587, William Shakespeare abandonna Stratford, sa bourgade natale, et la tradition veut qu’il ait suivi les comédiens du comte de Leicester qui y jouèrent durant l’été de cette année-là. Or, où alla précisément cette troupe en quittant Stratford ? Tout droit à Lathom House, chez les Stanley : voilà une