Page:Boulenger - L'affaire Shakespeare, 1919.djvu/27

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
21
EXPOSÉ.

bruits sinistres coururent : on dit qu’il avait été empoisonné, envoûté, et des gens osèrent accuser son frère et successeur ; enfin un grand procès s’engagea entre le nouveau comte et la comtesse douairière, sa belle-sœur, qui réclamait une grosse partie de la fortune des Derby. La procédure traîna : six ans après la mort de Ferdinando, William n’était pas seulement assuré de conserver le domaine familial de Lathom, et cependant il lui fallait soutenir son nom et son titre, criblé de dettes comme il l’était. Il ne semble pas avoir été très « pratique » : il empruntait, vendait ses terres, et assez mal, car il fut certainement exploité par des agents d’affaires et dut garder rancune à ces Shylocks. Les procès se terminèrent entre 1603 et 1610 par une série d’accords conclus entre les parties.

En même temps qu’il éprouvait ces soucis, William Stanley avait d’autres ennuis. Il s’était marié en 1595 à Élisabeth de Vere, fille du comte d’Oxford, qui paraît avoir été d’une santé chancelante. Durant l’été de 1597, cette faible créature aurait eu une intrigue avec lord d’Essex, et c’est sans doute à cela qu’il faut rapporter les faits que nous expose un document intéressant. Il y est question de scènes terribles que le comte jaloux fait à sa femme qui ne se défend que par la douceur et les larmes, si bien que les officiers de Milord, révoltés, se décident à une démarche, et s’étant rendus auprès de lui, ils lui exposent qu’ils ont toujours fidèlement servi sa famille et lui-même, mais qu’ils suivront tous le parti de Milady injustement accusée. Il y eut réconciliation entre les époux. Pourtant la comtesse mourut dans un château éloigné,