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MERLIN L’ENCHANTEUR

mine noire, toutes trois belles et gracieuses à regarder, mais surtout la fille d’Agravadain.

— Heureux, pensa Merlin, qui avec une telle pucelle pourrait dormir ! Si je ne sentais un si grand amour pour Viviane ma mie, je la tiendrais cette nuit dans mes bras. Je dois la faire avoir au roi Ban : l’enfant qui naîtra d’eux aura de grands destins.

Alors il jeta un enchantement et, sur-le-champ, le roi et la pucelle s’aimèrent éperdument.

Au souper, Agravadain plaça Ban et Bohor entre lui et sa femme, qui était belle et de bon âge, car elle n’avait pas trente ans ; les chevaliers de la suite s’assirent à d’autres tables. Quant à Merlin, sous l’apparence d’un jouvenceau de quinze ans aux cheveux blonds et aux yeux verts, vêtu d’une cotte mi partie de blanc et de vermeil, ceint d’une cordelière de soie où pendait une aumônière d’or battu, il tranchait à genoux devant le roi Ban. Les gens du château le prenaient pour un valet de leurs hôtes, et ceux-ci pensaient qu’il appartenait au château ; mais il était si beau que les pucelles ne pouvaient s’empêcher de le regarder, hormis la fille d’Agravadain, toutefois, qui ne quittait pas des yeux le roi Ban et changeait de couleur à chaque instant, car tantôt elle souhaitait d’être toute nue dans ses bras et tantôt elle se demandait comment une telle pensée pouvait lui venir. Et Ban, de son côté, la désirait éperdument ; mais en