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LA PRISON D’AIR

quand je m’éveillai, je me trouvai sur un lit magnifique, dans la plus belle et la plus close chambre qui ait jamais été. « Ha, dame, lui dis-je, vous m’avez trompé ! Maintenant que deviendrai-je si vous ne restez céans avec moi ? — Beau doux ami, j’y serai souvent et vous me tiendrez dans vos bras, car vous m’aurez désormais prête à votre plaisir. » Et il n’est guère de jour ni de nuit que je n’aie sa compagnie, en effet. Et je suis plus fol que jamais, car je l’aime plus que ma liberté.

— Beau sire, j’en ai grand chagrin, et le roi mon oncle, qu’en pensera-t-il quand il le saura, lui qui vous fait chercher par toutes terres et pays ?

— Il le lui faudra souffrir, car il ne me verra jamais plus, ni moi lui, et nul après vous ne me parlera. Or retournez-vous-en. Saluez pour moi le roi et madame la reine et tous les barons, et contez-leur mon aventure. Vous les trouverez à Carduel en Galles. Et ne vous désespérez pas de ce qui vous est advenu. Vous retrouverez la demoiselle qui vous a enchanté ; cette fois n’oubliez pas de la saluer, car ce serait folie. Allez à Dieu, et que Notre Sire garde le roi Artus et le royaume de Logres, et vous, et tous les barons, comme la meilleure gent qui oncques fut !

Telles furent les dernières paroles de l’enchanteur. Et le nain Gauvain se remit en route