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MERLIN L’ENCHANTEUR

vers Carduel, heureux ensemble et dolent, heureux de ce que Merlin lui prédisait la fin de son aventure, dolent de ce que son ami fût ainsi perdu à toujours.


LV


Quand il traversa la forêt où il avait croisé la demoiselle qui lui avait jeté ce mauvais sort, il craignit si fort de la rencontrer et de ne pas la saluer, qu’il ôta son heaume pour mieux voir. Il aperçut ainsi à travers les buissons deux chevaliers à pied qui avaient attaché les rênes de leurs chevaux à leurs lances fichées en terre ; ils tenaient sur le sol par les jambes et les mains une demoiselle qui se tordait pour leur échapper, et faisaient semblant de la vouloir forcer. Aussitôt, il avança, lance sur feutre, et leur cria :

— Vous méritez la mort, de faire ainsi violence à une demoiselle sur la terre du roi Artus ! Ne savez-vous qu’elles y sont assurées contre tous ?

— Ha ! Gauvain, s’écria la pucelle, maintenant je verrai s’il y a assez de prouesse en vous pour que vous me délivriez de cette honte !

À ces mots, les chevaliers lacèrent leurs heaumes.