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MERLIN L’ENCHANTEUR

nouveaux écus, et, montant sur des chevaux pris au passage, ils se rejettent dans la mêlée.

En selle sur un haut destrier très fort et très allant, le duc Frolle avait fait tout le jour un grand massacre des gens de Léodagan. Quand il vit que les Romains et les hommes du roi Claudas lâchaient pied et que sa gent commençait de plier, il prit à deux mains sa masse de cuivre, qu’un homme ordinaire aurait eu peine à soulever, et il se mit, grand et puissant comme il était, à asséner de tels coups qu’autour de lui le sang coulait en ruisseau. Pourtant, lorsque son enseigne eut été abattue, à ce coup, ceux qui l’entouraient, eux-mêmes se mirent à fuir et il comprit qu’il lui fallait battre en retraite, s’il ne voulait être pris. Bien dolent, il tourna bride et si éloigna, solitaire, au galop de son grand destrier.

Les compagnons de Merlin et les chevaliers de Carmélide étaient si occupés à pourchasser les ennemis débandés qu’ils ne l’aperçurent pas. Seul, le roi Artus se mit à sa poursuite.

Il l’atteignit dans une obscure vallée, creusée entre deux bois. Le soleil déclinait à cette heure et toute sa clarté était éteinte par les montagnes qui s’élevaient de chaque côté de ce val profond.

— Géant félon, cria Artus, retournez-vous ou vous êtes mort ! Voyez qu’un seul homme vous poursuit !