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L’ÉPÉE BRISÉE

se mit à genoux et fit oraison de très grand cœur ; puis il baisa la terre : et aussitôt les cieux parurent se fendre, les airs noircir, la terre trembler, et la foudre tomba sur les idoles et les détruisit ; il en sortit une fumée si puante que tous les Sarrasins churent en pâmoison. Et quand ils furent revenus à eux :

« — Voyez comme vos dieux sont puissants ! leur dit Joseph. Sachez que Celui qui les anéantit vous anéantira tout de même, si vous ne vous amendez !

« — Je vois bien, dit Matagran, que votre Dieu est plus fort que je ne croyais. S’il guérissait mon frère, je croirais en lui.

« Joseph pria de nouveau et bientôt le blessé se leva et dit qu’il était aussi sain que s’il n’eût jamais été navré. Alors les Sarrasins se prosternèrent et requirent chrétienté.

« Joseph les baptisa ; après quoi il retira de sa propre cuisse le tronçon de l’épée qui y était resté et, dès qu’il eut fait le signe de la croix sur la plaie, elle se trouva guérie. Quant à la lame, sachez qu’elle était aussi blanche et claire que si elle ne fût point entrée dans sa chair. Il la prit, demanda l’autre moitié au Sarrasin qui l’avait frappé et dit :

« — Épée, celui qui te ressoudra sera le meilleur chevalier du monde, celui qui mettra les aventures du Saint Graal à fin.

« J’avais pensé, continua le chevalier aux