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aujourd’hui après la liquidation de l’affaire des Balkans, d’avoir, sans tirer l’épée, assuré la tranquillité du monde.

Mais qui ne voit qu’un pareil état de choses est essentiellement précaire, qu’il ne peut durer sans accroître indéfiniment le danger d’une guerre qui serait d’autant plus formidable qu’elle entraînerait, le moment venu, l’ensemble des États ?

On se rend compte, en effet, que dans une Europe où se mêlent des combinaisons aussi multiples, un conflit ne pourrait être localisé et que, par le jeu des alliances, des ententes, des traités publics ou secrets, l’incendie allumé sur un point du continent risquerait d’aboutir à une conflagration générale compromettant la civilisation tout entière. La preuve de ce danger permanent n’est-elle pas dans la lutte incessante pour l’accroissement des armements sur terre et sur mer, lutte que chaque année révèle plus aiguë ? Chacun des États ne manifeste-t-il pas, en s’imposant chaque jour des sacrifices plus considérables, qu’il n’a aucune confiance dans la solidité de cette diplomatie de l’équilibre ?

L’opinion ne voit-elle pas qu’il y a là comme un vaste échafaudage sans fondations profondes et que, si l’un seulement des étais dont on soutient artificiellement sa faiblesse, venait à manquer, ce serait tout l’édifice de la civilisation qui risquerait de s’écrouler ?