Page:Bourget - Cruelle Énigme, Plon-Nourrit.djvu/169

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répondit-elle d’une voix à peine distincte,

— « Et tout le reste est un mensonge ?… » supplia-t-il éperdu.

Ah ! pour un mot sorti de cette bouche, il eût donné sa vie, à cette seconde. Mais la bouche restait muette, et, sur les joues si pâles de cette femme, des larmes se mirent à couler, lentes et longues, sans un sanglot, sans un soupir, comme si c’eût été son âme qui pleurait ainsi. Un tel silence, de telles larmes, dans un tel instant, n’était-ce pas la plus claire, la plus cruelle de toutes les réponses ?

— « C’est donc vrai ?… » interrogea-t-il encore. Et comme elle continuait à se taire : « Mais réponds, réponds ! » reprit-il avec une violence effrayante, qui arracha à cette bouche, dans les coins de laquelle continuaient à couler ces larmes lentes, un « oui » si faible qu’il l’entendit à peine, et cependant il devait l’entendre toujours ! — Il se releva d’un bond et tourna les yeux autour de lui avec égarement. Il y avait des armes appendues aux murs. Une tentation de lacérer cette femme avec un des poignards dont l’acier brillait s’empara de ce fils de soldat, si forte qu’il recula. Il regarda de nouveau ce visage sur lequel les mêmes larmes coulaient, intarissables. Il jeta ce « ah ! » d’agonie, sorte de cri de bête blessée à