Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/150

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Je l’ai reconnue, à ces cheveux, pour cette petite fille que j’avais vue l’autre jour, dans ce même jardin… Je l’avais prise, vous vous rappelez, pour la fille de cette dame malade à qui elle donnait la main cette fois-là, et cette dame elle-même pour notre nouvelle voisine d’en haut. Il paraît que je ne m’étais pas trompée… Mais cette fois j’ai pu voir son visage. Vous n’imaginez pas l’adorable créature, et frêle, menue, gracieuse, et des yeux d’un brun doux, tout grands ouverts dans un teint de la couleur de vos roses… » Et elle montra des roses blondes, à peine rosées, avec une nuance d’un jaune délicat et comme souffrant au pli des pétales, dont Francis tenait une touffe à la main. Il les avait prises au marchand de fleurs établi en plein vent, à l’angle de la place, un peu par habitude et beaucoup sans doute afin de se ménager une phrase d’entrée. — « Mais, » insistait Henriette, « vous comprendrez d’un mot l’intérêt particulier qu’elle m’a inspiré tout de suite. Elle ressemble d’une manière frappante à cet idéal portrait de votre sœur à dix ans que nous aimons tant… N’est-il pas vrai, mère ?… »

— « Il y a un air, » dit Mme Scilly, « réellement un air… Mais je ne suis pas hantée comme toi du démon des ressemblances, et puis ces petits êtres trop nerveux, trop sensibles, possèdent tous cette même grâce… »