Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/156

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à l’époque où même les petites filles subissaient la déformation de la crinoline. Que cette vieille et pauvre chose, humble relique de leur commune enfance, remuait dans le cœur de Francis de souvenirs touchants, de tristes récurrences aussi et d’amers regrets ! Le nom du photographe et celui de l’endroit lui rappelaient un long, un paisible été passé au bord de la mer avec Julie, avec leur père et leur mère qui semblaient pleins de vie, et sur une plage de Bretagne où il n’était jamais retourné. Ce temps datait d’hier, et qu’il était loin dans l’irréparable nuit ! Il revoyait sa grande petite compagne d’alors, cette jolie sœur aînée si sérieuse déjà, si protectrice, en train de jouer avec lui, sur les rochers de la grève retentissante, à des jeux sages, réservés, presque silencieux ! Elle haïssait les mouvements brusques, les divertissements bruyants, le désordre, les visages nouveaux, et son occupation favorite était de faire la maman avec lui, — de le traiter comme Adèle Raffraye traitait son immense poupée. Que c’était bien une action dans les goûts de Julie, que cet emmaillottement minutieux de cette poupée malade, comme aussi le reploiement farouche devant une caresse d’une inconnue ! — Ah ! Si la ressemblance dont avait parlé sa fiancée était autre chose qu’une analogie de délicatesse, si elle était vraiment écrite dans les traits d’Adèle, il n’aurait pas besoin de voir