Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/178

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rappeler ses trop justes griefs contre Pauline, que prouvaient-ils ? Qu’ayant un mari et deux amants, cette haïssable femme se prostituait à trois hommes, et qu’elle avait risqué également d’être mère entre les bras de chacun d’eux ? Soit. Mais qu’elle fut devenue mère dans ses bras à lui, le visage de l’enfant le lui avait crié, ce visage où l’hérédité de la race était écrite d’une indéniable écriture. Il essayait aussi de se démontrer qu’il y a de ces caprices de ressemblance qui ne démontrent rien. N’arrive-t-il point, par exemple, que l’enfant du second lit d’une veuve ressemble au premier mari ? Non. Pas comme cela. Pas avec cette identité de corps, d’âme, de nature. Il avait vu de ses yeux le fantôme de sa sœur devant lui, sa sœur de nouveau vivante, — hélas ! de quelle pauvre, de quelle faible vie de fantôme en effet ! Il avait vu son enfant. De même qu’autrefois aucun raisonnement n’avait prévalu en lui contre le soupçon, quand il se rappelait sa station devant le rez-de-chaussée fatal, la femme voilée descendant du fiacre, — et le reste, — de même aucun raisonnement ne prévalait à cette heure contre cette nouvelle certitude. C’était la tristesse des tristesses qu’elle ne fut pas contradictoire avec la première. Mme Raffraye l’avait trahi pour Vernantes, comme elle avait trahi d’abord pour lui son mari. C’était une malheureuse, et qui avait peut-être eu encore d’autres