Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/249

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— « Je suis très bien, » répondit la mère. « Que je t’embrasse d’abord, et puis assieds-toi là pour me raconter ta soirée. T’es-tu amusée ?… »

— « Oh ! beaucoup ! beaucoup !… » reprit l’enfant, et ses yeux quittèrent la malade pour fixer dans l’espace l’image du tableau qu’elle venait de contempler en réalité, et qui se transformait déjà en une grandiose vision de féerie, grâce à la magie de son enfantine mémoire. « Figure-toi, » racontait-elle, « qu’il y avait une foule, mais une foule, mille personnes peut-être… et au milieu du salon un arbre aussi haut que le vieux sapin du parc à Molamboz, et des bougies sur cet arbre, je ne sais pas, moi, plus de mille aussi, et des musiciens, de vrais acteurs, mis comme des pantins, qui dansaient en chantant, et un bonhomme Noël qui ressemblait au père Jean-Claude de chez nous et qui m’a apporté cette fille… Je vais la mettre à dormir avec l’autre cette nuit. Comme cela je serai sûre qu’elles seront bonnes amies demain… Et puis… » Elle s’arrêta quelques secondes. Ce mot d’amie, par une naturelle association d’idées, lui rappelait tout à coup le souvenir de sa voisine. « J’oubliais de te dire, » ajouta-t-elle, « que j’étais à côté d’une demoiselle si gentille !… tu te souviendras, je t’en ai parlé l’autre jour, celle que j’avais vue dans le jardin… »

— « Oui, » interrompit Annette avec un léger