Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/269

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j’ai tant souffert par vous !… Oublions-le, pour ne plus rien savoir, sinon que vous avez été une très bonne mère et que je suis prêt, moi, non pas à revendiquer mes droits de père, mais à en accepter le plus humble devoir, celui de ne plus jamais perdre Adèle de vue. Si c’est un rêve que d’avoir souhaité des relations possibles entre nous, ce n’est pas celui d’un homme vindicatif, avouez-le… Oui, je rêvais que cette rencontre en Sicile, si étrange qu’elle m’a donné l’impression d’une destinée, d’une Providence, servît de point de départ à des rapports nouveaux entre nous et vraiment dignes de ce que doit apporter de réconciliation la présence innocente d’une enfant. Ce voisinage les rendait si faciles, ces rapports ! Il m’aurait tout naturellement permis d’être là plus tard, dans l’ombre, si jamais Adèle avait besoin d’un protecteur… Sa grâce est si unique ! N’avez-vous pas compris qu’elle n’a pas touché que mon cœur ?… »

— « Ainsi, c’est vrai, c’est bien vrai, vous avez rêvé cela !… » fit Pauline. Elle avait maintenant dans la voix, non plus la colère de tout à l’heure, mais une amertume affreuse, et Francis y eût discerné, s’il eût pu lire jusqu’au fond de cette âme en détresse, la haine irréfléchie, instinctive, passionnée, qu’elle portait à son mariage, — la preuve, par conséquent, que tant de rancune accumulée ne l’avait pas guérie entièrement de lui. — «… Vous