Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/291

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— « Heureusement, » reprit le jeune homme, « ou plutôt, » ajouta-t-il, « malheureusement !… » La mère et la fille levèrent toutes deux la tête avec une appréhension qui augmenta son remords, et il continuait, s’adressant cette fois à la comtesse :

— « Tranquillisez-vous, il ne m’a pas trouvé de maladie grave… Mais je crois bien que c’est pire… Il paraît que je suis seulement sous une mauvaise influence, comme ils disent ici, et que, dans ces climats, il ne faut pas trop jouer avec cela de peur de prendre les fièvres. Enfin, le docteur est d’avis que je devrais abréger plutôt mon séjour ici… »

— « Vous allez partir !… » s’écria Henriette.

— « Je crois qu’il le faut…, » répondit-il.

— « Et quand ? » demanda-t-elle.

— « Naturellement pas avant le 1er janvier, je n’ai pas voulu entendre parler de commencer cette année sans vous ; mais le médecin pense que le 2, le 3 au plus tard, ce serait sage de me décider, plus que sage, indispensable… »

La jeune fille le regardait tandis qu’il parlait. Il ne put soutenir la plainte muette de ces deux beaux yeux où il n’avait jamais lu tant d’angoisse. Ce fut une impression physique, pareille à celle qu’il eût éprouvée s’il avait tordu le bras de la délicate créature, et si l’os avait crié en se brisant. Cette volonté de départ, qui, tout