Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/349

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n’est-il pas vrai ? Rentrer à Paris et vous laisser dans cette situation me serait trop pénible… »

— « À Paris, non, » dit la comtesse. « Mais il faut que vous quittiez Palerme et que vous attendiez ailleurs le résultat de l’entretien que j’aurai avec Henriette. Ici nous ne pouvons ni changer nos habitudes, ni les continuer dans les conditions où nous nous trouvons aujourd’hui. Gagnez Catane demain par le premier express. Vous êtes à quelques heures. Je puis vous faire revenir du matin au soir. Voyez-vous Henriette vous sachant à deux pas d’elle, exposée à vous rencontrer si elle vient dans ce salon, préoccupée peut-être de l’idée que vous avez revu cette femme ?… Pardon de vous parler si franchement, mais nous devons tout prévoir. Jamais elle ne reprendrait son équilibre. Faites ce que mon instinct de mère m’inspire de vous demander. Partez… Je n’ignore pas que c’est un grand, un dur sacrifice, mais vous y consentirez par amour pour elle… »

— « Ainsi vous espérez me rappeler, » répondit-il, « vous espérez qu’elle me pardonnera, vous ne croyez pas que j’aie perdu tous mes droits sur son cœur ?… Avec cette idée, moi aussi, j’aurai la force de tout supporter. Je partirai demain, bien triste, bien anxieux, mais confiant tout de même dans ce pardon possible, puisque vous, sa mère, vous ne m’avez pas condamné… »