Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/361

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aurais cédé, que je ne me sentirais guère la force de te gronder. Tu en aurais été déjà trop punie. Mon Dieu ! » ajouta-t-elle, « je savais que je t’aimais plus que tout au monde. Je ne savais pas combien, avant de t’avoir prise contre moi sur le seuil de cette chambre où tu venais d’être frappée… Tu vois, je ne t’ai rien demandé. J’ai respecté ta peine. Je la respecterai encore. Je ne veux que te soigner comme tu le désires. Souviens-toi seulement que je suis là… »

— « Chère mère, » répondit la jeune fille en prenant entre ses mains brûlantes la main de celle qui lui parlait ainsi. Puis, après un silence, d’une voix basse, comme honteuse et de nouveau avec la pourpre de l’émotion sur sa joue : « Chère mère, il a dît que cette petite Adèle était sa fille… »

— « Tu l’as entendu, » fit la comtesse qui voyait que la pauvre créature n’osait pas formuler la question qui lui brûlait le cœur. « C’est une chose affreuse qu’une femme puisse être mariée et devenir ainsi mère d’un enfant qui n’est pas l’enfant de son mari… Mais quand tu seras entrée dans le monde, tu verras que cette chose affreuse se rencontre trop souvent. Toi qui es si bonne chrétienne, rappelle-toi et aujourd’hui et dans l’avenir le mot que Notre-Seigneur a dit à la femme adultère : « Je ne vous condamne pas non plus… »