Page:Bourget - La Terre promise, Lemerre.djvu/392

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idée la remplit, malgré elle, d’une sorte de joie qui se transforma aussitôt en remords. C’est le second symptôme de la fièvre mystique, que ce scrupule épouvanté devant l’espoir. La moindre perspective de douceur nous apparaît comme une criminelle concession, quand notre âme veut, suivant cette autre parole de la plus enthousiaste des saintes, « souffrir ou mourir. » Henriette eût été soumise à la plus coupable des tentations, qu’elle n’aurait pas lutté contre cette tentation avec plus d’ardeur qu’elle n’en mit à combattre cet élan si naturel de son cœur, qui l’avait fait s’attarder un instant avec complaisance à l’idée d’un obstacle infranchissable dressé indépendamment d’elle entre Francis et Pauline Raffraye. « Non, » conclut-elle en employant, mais dans un sens bien différent, les termes mêmes qu’avait employés sa mère, « la main de Dieu est dans tout cela, et il n’est pas possible que le sacrifice qu’il m’aura si visiblement inspiré soit perdu… C’est à lui que je dois demander de me soutenir et d’achever l’œuvre d’expiation qu’il m’a tracée d’une manière trop nette pour que je recule… Que j’aie seulement la force de sortir afin d’aller me confesser et communier, et nous serons tous sauvés !… »

C’était encore une des expressions de Mme Scilly, mais prise aussi dans une bien autre signification. Ce désir de s’approcher de la sainte table et la