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Page:Bourget - Mensonges, 1887.djvu/48

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— « M. Larcher ? » dit l’employé. « Vous ne savez pas sa boisson ordinaire ? … Hé ! hé ! » ajouta-t-il d’une voix plus basse et en regardant du côté du corridor prudemment, « j’ai lu ce soir même un article de journal où il est joliment arrangé. »

— « Conte-nous ça, petit père, » fit madame Offarel en posant son ouvrage sur ses genoux, pour la première fois de la soirée, et laissant paraître sur son visage la joie naïve de ses mauvais sentiments, comme elle avait montré tout à l’heure sa naïve affection pour la petite chatte.

— « Il paraît, » reprit le vieil homme en soulignant ses mots, « que, dans les salons où va M. Larcher, on lui donne à boire, au lieu de tasses de thé, des verres de sang. »

— « Des verres de sang ? » interrogea Fresneau abasourdi de cet étrange racontar, « et pourquoi faire ? »

— « Pour le soutenir, donc, » dit vivement madame Offarel, « vous n’avez pas vu cette mine ? Ah ! il doit en mener une jolie vie ! »

— « Il paraît encore, » continua le narrateur qui tenait à placer quelques anecdotes de plus, avec cette basse ardeur de crédulité propre aux bourgeois, aussitôt qu’il s’agit d’une des innombrables calomnies d’envieux auxquelles sont en proie les hommes connus, « il paraît qu’il vit