Page:Bourget - Un homme d’affaires - Dualité - Un Réveillon - L’outragé, Plon, 1900.djvu/26

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du cœur, et qu’il ne peut plus tenir un fleuret, votre raison a cessé d’être valable. On est toujours à temps de se fâcher en certaines circonstances. Alors ?… Voulez-vous que je vous dise pourquoi Nortier ne se fâche pas et ce dont il a eu peur, plus simplement ? Il a eu peur de ses domestiques… Mais oui, mais oui !… On ne sait pas le rôle que cette crainte-là joue dans les complaisances conjugales ! Quand un monsieur est l’amant d’une dame, c’est qu’il a l’habitude de venir dans la maison, et, pour qu’il n’y vienne plus, si ce n’est pas de plein gré qu’il se laisse congédier, il faut donner l’ordre au portier de ne plus le recevoir, au maître d’hôtel, au valet de pied… C’est bête comme tout, cette petite démarche… Il y a neuf maris sur dix qui n’arrivent pas à la faire… » — « Ils ne sont pas Nortier, » reprit Desforges. « Non. Vous serez plus dans le vrai en disant qu’il a tout supporté à cause de sa maison. Il a le goût de recevoir, pis que le goût, la passion. C’est trop naturel. On ne gagne pas des millions pour les manger tout seul. Or, pourquoi avait-il épousé sa femme, qui n avait pas un fifrelin, mais qui était née de