Page:Bourget - Un homme d’affaires - Dualité - Un Réveillon - L’outragé, Plon, 1900.djvu/296

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comme à vif et toujours saignant. Le doux et paisible après-midi d’automne continuait d’envelopper toutes choses de son atmosphère bleue et voilée, la tiède brise, de secouer une par une les feuilles d’or qui tournoyaient lentement dans l’air humide ; les géraniums et les anthémis, de marier leurs bouquets ; les cyprès, de frémir, et les bruits de la grande ville, de déferler autour de l’asile funèbre comme autour d’un îlot de silence et de paix. L’ancien ami de Jules Bérion avait du coup perdu et la notion de l’heure qu’il était, et du ciel qu’il faisait, et de tout, excepté de ceci, que l’homme dont la trahison l’avait tant fait souffrir avait voulu dormir son dernier sommeil là, tout à côté du caveau où lui-même, Michel Gontier, reposerait un jour. — « Il l’a voulu, voulu, » se répétait-il en allant droit devant lui et prenant les allées les unes après les autres. « Ce n’était donc pas ce que j’ai cru, l’exécution machinale d’un projet consigné dans un testament oublié autrefois, quand nous venions ici ensemble et qu’il me disait son intention d’avoir son tombeau près du mien… Son tombeau près du mien !… » Il se répétait celte