Page:Bourget - Un homme d’affaires - Dualité - Un Réveillon - L’outragé, Plon, 1900.djvu/308

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

endant plus présent encore ce que le gardien venait de lui apprendre, une question se posa devant sa rêverie, mais nette, mais précise. — « Pourquoi, » se demandait-il, « oui, pourquoi a-t-il voulu être enterré là ? ,.. Pourquoi ?… Mais pourquoi m’a-t-il écrit un mois avant sa mort ? Se savait-il atteint ? Sans aucun doute, si j’en crois ce que m’a raconté ce gardien, qui n’avait pas de raison, lui, pour me mentir… Que me disait-il dans cette lettre ? Il m’y demandait pardon, sans doute. Pardon ? Comme s’il y avait un pardon pour cet outrage. Comme si rien, rien, même la mort, pouvait effacer cette chose, empêcher qu’il ne m’ait trahi, infâmement, ignoblement trahi… Sur le point de mourir, un peu d’honneur lui est revenu. Il s’est repenti… Il a désiré une pitié de moi, un mot, un geste, de quoi adoucir un peu son agonie… Et puis, comme il a vu que je ne lui répondais pas, il a voulu me braver, même dans la mort. Voilà le secret du choix de son tombeau. Ah ! L’ignominie !…"

C’eût été une ignominie, en effet. Mais Michel avait beau se démontrer à coups de raisonnement