Page:Bourotte - Le Devoir, 1867.djvu/5

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Mais si parfois un médecin de l’âme
Veut du colosse aux paroles de flamme
Interroger et le pouls et le cœur ;
Il y découvre un morbide mélange
De fièvre folle et de torpeur étrange
Et, dans la veine, une froide liqueur.
Oui, c’est un roi ; mais son trône est sans base
Et sur le sable il chancelle penchant.
C’est un soleil, mais un soleil couchant ;
Et, sans chaleur, il aveugle, il écrase.
Car aux dieux faux il a sacrifié !
Car, en délire, il a défié
Deux grands écueils : l’orgueil et la matière !
Car cette coupe où les lèvres ont bu
Versant l’ivresse a déplacé le but
Et fait courber les désirs vers la terre !…


Ils ne sont plus, ces beaux âges de foi
Où l’homme ayant au ciel son espérance
Comme une tâche acceptait l’existence
Et pèlerin sentait une âme en soi !
Ils ne sont plus, ces foyers où le père
Gardait unis, juge tendre et sévère,
Tous ses enfants par un même lien !
Ils ne sont plus, ces temps où, sainte et grave,
D’un joug béni l’épouse aimait l’entrave
Et du plaisir alors n’attendait rien !