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Page:Bousquet - Iris et petite fumée, 1939.djvu/110

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chambre une odeur pareille à celle que j’avais respirée en entrant chez Monsieur Sureau ; mais mêlée à des émanations d’huile brûlée et de charbon qui traversaient la sensation sans l’altérer, suffoquaient l’odorat pour qu’il eût sa force intacte dans un parfum divin dont mon esprit s’était imprégné avant d’avoir laissé à mes sens le loisir de se reconnaître.


« C’est plus qu’un parfum », me dis-je en tremblant un peu et sans savoir d’où venait cette émotion à forme de légère et tenace griserie. Dans ce que je prenais pour une odeur respire je ne sais quoi d’incorruptible ; et je n’ai que mon odorat pour connaître ce dieu dont le parfum est le corps.


Au moment où mon indiscrétion me donnait enfin un sentiment de honte, un frisson parcourut mon échine, un rayon de lumière dissipait les ténèbres qui m’avaient poussé. Je pivotai rapidement sur mes talons et me trouvai devant Monsieur Sureau qui, à la lumière d’une lampe qu’il soulevait entre nous, regardait avec une curiosité un peu narquoise la photographie que je tenais à la main. Ce regard me gênait ; mais il me gênait un peu moins que les pensées dont il aurait pu faire hommage à mon attitude d’espion. Aussi, j’oubliai la promesse que