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Page:Boutrais - La Grande Chartreuse (Nouvelle édition refondue et mise à jour), 1930.djvu/42

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XIe siècle. S. Bruno, fondateur.

priés d’attendre jusqu’après son retour de Rome où il devait se rendre. Les circonstances, d’ailleurs, ne permettaient point à notre Saint, au milieu des luttes qu’il soutenait, de mettre son vœu à exécution aussi vite qu’il l’aurait désiré ; mais lorsqu’il fut rentré à Reims, il y songea sérieusement, et, à la nouvelle qu’on jetait les yeux sur lui pour le nommer Évêque, il comprit qu’il ne pouvait se lier les mains de la sorte après avoir promis à Dieu d’entrer en religion ; il sentit, sans peine, que l’heure de briser avec le monde venait de sonner, et, renonçant à tout, s’éloigna de Reims. Tant que le monde lui livra la guerre, un motif d’honneur le fit rester sur la brèche ; dès qu’il lui donna ses faveurs, il partit à l’instant même.

Bruno sortit de la ville accompagné de deux amis, Pierre et Lambert, et c’est à nos voyageurs que s’applique ce passage d’une ancienne chronique : « Par ces trois saints hommes et par ceux qui prendrent exemple à eux et vesquirent et conversèrent aussy comme eux, fut commencié et est encore maintenu et gardé l’Ordre de Chartreuxe[1]. »

— Comme tant d’autres, Bruno, malgré son inébranlable résolution de se faire religieux, cherchait un peu sa voie, et le premier besoin qu’il éprouva au commencement d’une existence si nouvelle fut de se donner un guide. Ce grand homme, qui venait de jouer un rôle si important dans les affaires de l’Église de Reims, n’hésita point à se mettre avec la simplicité d’un enfant entre les mains d’un directeur. Il se rendit, dans ce but, à

  1. Apud Boll. Acta SS. vi oct., no 387.