Page:Boutroux - L’idéal scientifique des mathématiques.djvu/25

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En même temps que l’on situera la découverte dans l’histoire de la pensée mathématique, on devra la confronter avec l’ensemble des découvertes de la même époque. Non seulement on relèvera attentivement les inventions voisines ou équivalentes qui souvent surgissent presque simultanément dans l’esprit de nombreux auteurs, afin de mesurer, si l’on peut ainsi dire, l’intensité du courant dans lequel sont entraînés ces savants, mais l’on rapprochera également les découvertes les plus distantes en apparence. Il arrive fréquemment, en effet, que plusieurs séries d’études, jugées sans lien entre elles par un observateur superficiel, et dont les auteurs même s’imaginent n’avoir entre eux aucun point de contact, procèdent cependant de préoccupations et de réflexions voisines ; la comparaison que nous établissons après coup entre ces études peut alors nous aider à retrouver l’orientation commune des spéculations qui leur ont donné naissance.

Considérons, par exemple, pendant la période post-cartésienne, les progrès de la géométrie analytique d’une part, et d’autre part le développement du calcul des séries institué par Newton et Leibniz. Œuvres indépendantes, pensera-t-on tout d’abord, dont l’une se rattache à la pensée de Descartes, tandis que l’autre, tournant le dos au passé, ouvre à la science des voies toutes nouvelles en posant les principes du calcul infinitésimal et de l’Analyse moderne. Pareille manière de voir ne résiste pas, cependant, à un examen attentif. Si, en