Page:Boutroux - L’idéal scientifique des mathématiques.djvu/31

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période contemporaine, pareillement, nous rencontrons de remarquables discontinuités. M. Brunschvicg nous fait voir en effet comment l’arithmétisme de Renouvier et le nominalisme de Helmholtz d’une part, le mouvement dit « logistique » d’autre part, la doctrine intuitioniste en troisième lieu, se font naturellement suite en s’opposant, et répondent aux différents aspects d’une science qui évolue. Jamais, peut-être, la philosophie mathématique n’a suivi une ligne aussi anguleuse que durant les vingt dernières années.

Allons-nous retrouver le même rythme, la même suite d’oscillations, dans le chemin parcouru par la pensée scientifique pure, dégagée de toute préoccupation philosophique ? Nous ne le croyons pas. Au contraire, il nous semble que les oppositions les plus importantes pour le philosophe disparaissent parfois presque complètement aux yeux de l’homme de science.

Ainsi, par exemple, une rapide revue de l’œuvre mathématique des Grecs nous amènera plus loin à conclure qu’il est impossible de tracer des coupures dans l’histoire de cette œuvre, et qu’on ne saurait y distinguer des théories ou des méthodes procédant de conceptions divergentes. Comme Paul Tannery et Gaston Milhaud, nous croyons à l’unité de physionomie de la science grecque.

Pareillement, l’étude attentive du mouvement mathématique du xviie siècle nous conduira à abandonner l’opinion — assez répandue — d’après laquelle la création du calcul infinitésimal aurait