Page:Boutroux - L’idéal scientifique des mathématiques.djvu/68

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Méthode[1], où contrairement à la conception platonicienne de la découverte intuitive, il oppose nettement l’ordre de l’invention à l’ordre rationnel des vérités mathématiques. Mais ce traité conclut la nécessité de reprendre sous la forme classique ou « géométrique » les résultats obtenus par des procédés indirects[2], ce qui montre que les méthodes introduites par Archimède dans la technique mathématique ne doivent pas, dans sa pensée, modifier le fond de la science. Quelles sont, au surplus, ces méthodes ? On y remarque des traits fort originaux, notamment l’appel fait à des considérations mécaniques pour résoudre des problèmes de mesure géométrique (c’est la principale innovation apportée par le Traité de la méthode[3]). Cependant les procédés les plus féconds parmi ceux qu’emploie Archimède dérivent directement d’un mode de rayonnement qui à son époque était loin d’être nouveau : le calcul par exhaustion ou méthode d’exhaustion. On sait que la méthode d’exhaustion, qui remplaçait pour les Grecs les méthodes modernes du passage à la limite et du développement en série, remonte sans doute aux Pythagoriciens et fut appliquée au ve siècle au problème de la mesure du cercle ; elle fut définitivement constituée par Eudoxe et ses disciples. Or, si ces géomètres, remarquant la puissance et l’élégance de la nouvelle méthode, y attachèrent un grand prix et en étudièrent de très près le mécanisme, ils ne pouvaient y voir cependant qu’un moyen accessoire.

  1. Ce traité, récemment retrouvé, a été publié en 1907 (traduction française dans la Revue générale des sciences, novembre et décembre 1907).
  2. Cf. le début du traité de la Quadrature de la Parabole. (Œuvres, trad. Peyrard, p. 318-19).
  3. Cf. Milhaud : le traité de la méthode d’Archimède, apud Nouvelles études sur l’histoire de la pensée scientifique, p. 135 et suiv.