cieux, je dis : « l’algèbre est un art scientifique. Son objet, ce sont le nombre absolu et les grandeurs mesurables, étant inconnus mais rapportés à quelque chose de connu, de manière à pouvoir être déterminés ; les choses connues sont des quantités ou des rapports individuellement déterminés ainsi qu’on le reconnaît en les examinant attentivement ; ce qu’on cherche dans cet art, ce sont les relations qui joignent les données du problème à l’[inconnue], qui de la manière susdite forme l’objet de l’algèbre[1] ».
Supposons, par exemple, que l’on sache que le nombre 2, moins le triple d’une quantité inconnue, égale cette même quantité, plus le nombre 34 : nous désignerons la quantité inconnue par la lettre x, et nous écrirons l’égalité (équation) 2 − 3 . x = x + 34. Ajoutons, de part et d’autre du signe =, une même quantité 3 . x − 34 ; nous obtenons 4 . x = 2 − 34 = 54, d’où, en divisant par 4, la valeur de x ; x = 516.
Pour atteindre ce résultat, le géomètre ou le pur arithméticien prendra des voies détournées ; comment pourrait-il, en effet, introduire de but en blanc dans ses raisonnements la soustraction ou la division par 4 d’une quantité qui n’est pas connue ? Au regard de l’intuition une semblable opération n’a pas de sens. L’algébriste, lui, ne s’embarrasse pas pour si peu, et il parvient instantanément à la solution du problème.
- ↑ L’algèbre — dit plus rapidement Herigone (Cours mathématique, t. II, 1634) — est l’art de trouver la grandeur inconnue en prenant comme si elle était connue et trouvant l’égalité entre elle et les longueurs données.