Aller au contenu

Page:Bouvier - Les Mystères du confessionnal, 1875.djvu/98

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

jugal pour éviter l’incontinence, cède à la passion, en matière légère, afin que la passion ne le précipite pas dans de graves péchés. C’est l’opinion de St Augustin, St Grégoire le Grand, St Fulgent, St Thomas, St Bonaventure, Sylvius, Natalis Alexandre, Collet, Billuart, Dens, etc.

On répond aux raisons alléguées par les partisans de la décision contraire :

1o Que St Paul n’exclut pas le but propre du mariage, c’est-à-dire la procréation des enfants, mais qu’au contraire il le suppose, et que ses paroles doivent être prises dans ce sens, qu’il faut éviter l’incontinence par l’usage du mariage pratiqué dans l’ordre de la reproduction de l’espèce ;

2o Que le catéchisme du concile de Trente doit être pris dans le même sens ;

3o Que l’Église ne détourne pas les vieillards du mariage parce qu’il pourrait peut-être en résulter des maux beaucoup plus grands, les fornications et autres incontinences.

D’où il résulte que l’institution du mariage n’a eu pour but que l’acte conjugal pratiqué pour la reproduction de l’espèce et pour rendre le devoir, et que ce n’est que d’une manière secondaire que cet acte est un remède à la concupiscence ; c’est pourquoi il n’est pas permis de demander le devoir conjugal à une femme stérile, avancée en âge ou enceinte ; et elle-même ne pourrait jamais le demander dans ce cas.

Cependant, les défenseurs de cette opinion disent que, dans les deux cas, le péché est seulement véniel ; car l’acte conjugal est bon en soi, et il n’est entaché de péché que parce qu’il ne tend pas à un but légitime ; or, ce défaut de but ne fournit pas matière à péché mortel. C’est pourquoi ils ne regardent pas comme répréhensibles les époux qui se livrent à l’acte conjugal d’une façon régulière, mais sans le faire dans le but de procréer des enfants, pourvu que ce but ne soit pas exclu. Ils disent encore qu’on doit craindre, qu’en voulant leur éviter des péchés véniels, on ne les précipite dans des péchés plus graves.

Cette controverse est donc de peu d’importance pour ce qui regarde les confesseurs, mais elle est de nature à éloigner du mariage des hommes timorés : on comprend facilement, en effet, que l’apôtre ait dit des personnes mariées : Ils seront soumis aux tribulations de la chair (1re aux Corinth., 7, 28) et au v. 8 du même chapitre : Je dis qu’il est bon d’être célibataire ou veuf, si on peut rester ainsi, comme je le fais moi-même.

De plus, les théologiens enseignent comme très probable que c’est encore un péché véniel de pratiquer l’acte conjugal, en partie dans le but de la reproduction de l’espèce, en partie pour le plaisir qui en est inséparable, puisque cet acte sort alors à satisfaire la passion. Voy., dans ce sens, Sylvius, t. 4, p. 663, Billuart, Dens, etc. De plus, Sylvius prétend que c’est un péché véniel de se livrer au plaisir qui résulte de l’acte pratiqué en vue de la génération, et de donner son consentement à ce plaisir ; car ce plaisir-là ayant sa source dans la corruption, est une chose honteuse et propre à obscurcir la raison. Cependant, Dominique Soto, Sanchez et d’autres enseignent comme très probable qu’il n’y a pas de péché dans ce cas, car c’est dans le but de la conservation de l’espèce que la nature a attaché le plaisir à l’acte charnel, comme elle l’a attaché au boire et au manger en vue de la conservation de l’individu, afin que ces actes essentiellement nécessaires ne fussent pas négligés.

On demande : S’il est permis d’user du mariage par motif de santé.

R. Il est certain qu’il n’est permis ni de contracter mariage ni d’en user uniquement dans le but de conserver ou de recouvrer la santé ; car une sem-