Page:Bove - Mes Amis.djvu/26

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Il voudrait que la guerre fût oubliée. Il regrette l’année 1910.

À cette époque, paraît-il, les gens étaient honnêtes, sociables. L’armée avait de l’allure. On pouvait faire du crédit. On s’intéressait aux problèmes sociaux.

Quand il parle de tout cela, ses deux yeux — le vrai et le faux — se mouillent et ses cils s’unissent par petites mèches.

L’avant-guerre a sombré si vite qu’il ne peut croire qu’elle n’est plus qu’un souvenir.

Nous aussi, nous abordons les problèmes sociaux. Il y tient. C’est la preuve, pour lui-même, que la guerre ne l’a pas changé.

Il me certifie, chaque jour, qu’en Allemagne, pays mieux organisé que le nôtre, les mendiants n’existent pas. Les ministres français devraient interdire la mendicité.

— Mais elle est interdite !

— Allons donc ! Et tous ces gueux qui vendent des lacets ! Ils sont plus riches que vous et moi.

Comme je n’aime pas les disputes, je me garde bien de répondre. J’avale mon café, qu’une goutte de lait a rendu marron, je paye et je sors.