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vos hardes, vos bijoux. J’ai pris sur moi tout à l’heure de donner des ordres à votre femme de chambre. Il me faut retourner à Bruyères, où les affaires de mon étude sont en souffrance. Je vous emmène, avec votre permission.

Prononcés d’un ton de véritable bonté, ces mots néanmoins rendaient immédiatement sensible à l’orpheline son désemparement, sa brusque chute dans le gouffre d’un obscur inconnu. Et des larmes lui montèrent aux yeux, en même temps qu’elle balbutiait de vagues expressions de gratitude.

— Par exemple ! protesta Me  Sigebert par une locution bien champenoise… Quoi de plus naturel : Ne sommes-nous pas vos seuls parents ? Et très proches, après tout. Le père du vôtre était cousin germain du mien. Vous êtes, en y songeant, quelque chose comme une petite-nièce à la mode de Bretagne. Du côté de votre mère, vous n’avez personne, je crois ?

— Elle était fille unique. Quelques cousins lui restent, mais à la Réunion, d’où elle était originaire, comme vous savez. Et c’est à peine si elle les connaissait, étant venue en France toute jeune avec mon grand-père, commissaire de la marine, qui s’était marié là-bas.

— Eh bien ! tant mieux, s’exclama rondement le notaire. Ainsi le privilège nous appartient-il sans conteste de vous donner place à nôtre modeste foyer. Ma femme et mes filles feront de leur mieux pour vous entourer de sympathie, d’affection. Ce n’est chez nous qu’un gros bourg tout rustique. Mais vous ne vous y déplairez pas trop, j’espère.

— Oh ! mon cousin, je me plairai auprès de vous, parce que vous êtes très bon. Et mes cousines aussi seront bonnes pour moi, j’en suis sûre. Je n’avais pas encore réfléchi à cela… ce coup m’a frappée si rudement… Mais où serais-je allée ?… Je dois avoir du courage… J’en aurai, je vous assure. Seulement les