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Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/104

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monde. Tu devrois pourtant être moins étonné que moi. Ton pere étois Génois : tu as été élevé jusqu’à l’âge de dix ans dans les pays nazaréens ; & quoiqu’alors tu ayes passé à Constantinople, d’où tu n’es sorti qu’à présent, il te doit rester une idée confuse de ce que tu as vû dans ta jeunesse.

J’ai lû avec plaisir ce que tu m’écris sur la superstition des Romains.

Il arrive journellement dans ce pays des preuves convaincantes des excès où elle peut entraîner le peuple. Dans le moment que je t’écris, il y a peut-être à Paris deux mille personnes qui sont attaquées de vapeurs, qui tiennent du démoniaque, & dont les extravagances & les fureurs passent pour des miracles. C’est un ordre du souverain pontife qui a rendu tous ces gens-là semblables à des possédés. Voici le fait.

Tu auras sans doute entendu parler à Rome d’une certaine constitution, qui fait beaucoup de bruit en France. Un prêtre [1], qui s’étoit joint aux opposans qu’elle avoit trouvés dans ce royaume, mourut il y a quelques années.

Pendant sa vie, il a été ignoré de l’univers entier : après sa mort, il a eu une réputation étonnante. Quelques-

  1. M. Paris. Il n’étoit que diacre.