Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/105

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uns des opposans allerent s’aviser de vouloir lui donner un de ces brevets, dont tu dis que le pape est le seul dispensateur, & par lequel un homme est reconnu pour un seigneur de la cour céleste. Comme ils n’espéroient pas que le souverain pontife y consentît jamais, ils résolurent de lui faire faire de si grandes choses, que le peuple lui accordât cette dignité, sans son consentement. Ils eurent recours au miracle : c’est là le grand moyen pour frapper les esprits ; & dans les choses qu’ils voulurent faire opérer par la vertu de leur confrère mort, ils y répandirent de la gaieté, & les ornerent de la pompe du spectacle. Es crurent, qu’en amusant le peuple par des objets gracieux, leurs miracles feroient un plus grand effet, que s’ils arrivoient simplement. Ils résolurent donc de donner au nouveau saint le pouvoir de guérir ceux qui auroient recours à lui par des ballets & des chansons. Un abbé [1], après avoir étudié long-tems en particulier, ouvrit le premier cet exercice. Il dansa sur le tombeau du prêtre une danse, dans laquelle il y avoit un pas nommé le saut-de-carpe, qui plaisoit infiniment au public, & que l’abbé faisoit dans la perfection.

  1. Les convulsions de l’abbé Becheran sur le tombeau de l’abbé Paris.