Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/218

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au bien de la patrie. Ils servoient d’équilibre entre la cour & le peuple. Les rois peu-à-peu abolirent ces assemblées. Ils étoient les seuls maîtres de les convoquer, & ils éviterent de le faire. Ils suppléerent, par leur autorité, aux ordonnances de ces états, & par ce moyen, leur seule volonté eut autant de force que les décisions de la nation entiere. La division des trois corps qui la représentoient, fut un des principaux moyens qui favorisa les souverains dans leur projet : la haine des ecclésiastiques contre la noblesse, l’envie du peuple contre ces deux états, devinrent le premier instrument du joug des François.

Cette désunion n’est point encore finie : le tems n’a pu la diminuer. L’ambition des pontifes [1], leur penchant à la domination, est une tyrannie qui paroît insupportable aux nobles.

Ils voient avec regret les dignités, les postes éminents remplis par des gens qui leur sont opposés. Ils souffrent à regret le pouvoir des ecclésiastiques ; & plus le crédit de leurs ennemis est grand, plus leur haine s’en augmente. Le peuple, de son côté, est charmé de l’abaissement de la noblesse. Il voit avec plaisir qu’on humilie ceux qui le méprisent : plus la noblesse est oppressée, plus il semble respirer

  1. Les évêques.