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Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/246

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Gassendi, touché de l’état de ce malheureux, le défabula de son erreur. Il fit en sa présence l’expérience de son baume sur un chien à qui il en fit avaler, & qui bientôt après s’endormit. Le berger fut mis en liberté. Apparemment il détrompa ceux de ses confreres qui croyoient les mêmes impostures.

Autrefois on brûloit en France ces prétendus magiciens. Les prêtres qui publioient avoir le droit de chasser les démons, & à qui ce pouvoir donnoit un grand crédit, favorisoient cette opinion. On ne voyoit que démoniaques, & que possédés : tout étoit plein d’enchantements. On eût dit qu’on étoit dans le tems des Amadis. Peu-à-peu le mensonge fut connu : le nuage qui éclipsoit la vérité se dissipa ; & l’on n’eut plus de foi à ces fourberies. Plusieurs parlements déciderent qu’ils ne croyoient point qu’il y eût des sorciers : lorsqu’ils jugèrent quelques-uns de ces imposteurs, ils les punirent comme des fourbes, & non pas comme des magiciens. La conduite des gens d’esprit fit ouvrir les yeux à bien des personnes. Actuellement le crédit des astrologues, magiciens, diseurs de bonne-aventure ne s’étend pas au-delà des femmes & du menu peuple.