Page:Boyer d’Argens - Lettres juives, 1754, tome 1.djvu/301

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qu’il s’écria comme un furieux. Vous serez damnée : il n’est point de rémission pour vous, pas même in articulo mortis ; point d’absolution, point d’absolution. Hélas ! mon Dieu ! s’écria la femme : qu’ai-je donc fait ? Ce que vous avez fait ? répondit le moine. Vous voyez de semblables peintures ? Vous souffrez que votre mari s’occupe à de pareils ouvrages ! Ce n’est point mon mari, repliqua-t-elle, qui a peint ces tableaux : c’est un autre peintre. N’importe qu’ils soient faits par un autre, répondit le zélé directeur, Point de salut pour vous, ou il faut dans le moment effacer & déchirer ces infamies._ La femme séduite par la peur de l’enfer, alloit faire cette belle expédition, lorsque le peintre arriva.

Il frémit du risque qu’avoient couru ses tableaux. Le prince pour qui ils étoient les avoit payés deux mille écus la piéce : le pauvre Sébastien Conchi eût été ruiné, s’il n’eût prévenu la fureur du moine. Il le chassa de chez lui, & défendit à son épouse de rentrer de sa vie dans son attelier.

Dans le pays où tu vis, mon cher Monceca, tu as souvent l’occasion aussi bien que moi, de voir de ses éclats d’une dévotion immodérée qui ressemble a la folie. Ils doivent cependant être plus