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Page:Boylesve - Mademoiselle Cloque, 1899.pdf/317

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MADEMOISELLE CLOQUE

— On établira ses comptes ! ça n’est pas bien difficile. J’ai-t-il pas de l’inquiétude ? Ah ! là, là ! Mon argent est aussi bien placé dans votre armoire que dans la mienne. Du moment qu’on vous tient ! J’espère bien, au moins, que vous n’êtes pas repartie pour les grandes Indes ! Vous n’allez pas vous remettre en chasse, à présent que vous voilà rentrée à la niche ? Eh bien ! si ça vous arrange de ne pas me payer, moi, ça m’arrange ; et puisque je vois que ça peut vous rendre service…

Il s’arrêta sur ce mot qui resta suspendu sur le silence et retomba en petites gouttelettes torturantes sur toute la surface de la sensibilité de Mlle Cloque.

Sa nature se révoltait ; son corps se soulevait pour protester, pour refuser l’humiliation que lui infligeait en pleine figure ce butor, et avec un raffinement qui sentait la préméditation.

Mais elle ne répliquait rien. Ce service qu’il lui offrait de plein gré, spontanément, n’était-ce pas celui qu’elle se proposait de lui demander elle-même ? Tandis que le mot résonnait encore dans la pièce, elle pensait qu’il eût été pourtant moins pénible d’implorer que de recevoir ainsi.

Loupaing ne sut pas cacher son triomphe. Sa joie montra qu’il n’avait eu que des présomptions sur les embarras d’argent de sa locataire et que la confirmation qu’il en recevait flattait ses desseins secrets.