On ne la trouve pas davantage dans les langues congénères[1]. D’où le latin l’a-t-il donc prise ? Elle vient des verbes comme adolesco, floresco, senesco, etc. On ne grandit, on ne fleurit, on ne vieillit pas en un instant : l’idée d’une action lente et graduelle s’étant d’abord introduite dans ces verbes, a paru ensuite inhérente au suffixe. Elle y a été irradiée.
Quelque chose de semblable s’est passé pour les verbes dits désidératifs, comme esurio, nupturio, empturio. S’ils suivent la conjugaison, d’ailleurs assez rare, en io, c’est qu’ils ont, à ce que je crois, pris modèle sur sitio, « avoir soif ». La syllabe qui précède la désinence n’est pas autre chose — malgré la différence de quantité — que les suffixes tor ou sor qui forment tant de substantifs en latin : emptor, « acheteur » ; scriptor, « écrivain » ; esor (pour ed-tor), « mangeur[2] ». La note désidérative est si bien entrée dans cette désinence, que Cicéron, parlant de Pompée, pouvait écrire à Atticus, bien sûr d’être compris : Sullaturit animus ejus et proscripturit.
Rappelons ici une discussion du siècle dernier qui montre combien il est aisé de se tromper en cette matière : on a plus vite fait de donner l’étymologie
- ↑ Cf. en grec εὑρίσκω, « je trouve », τιτρώσκω, « je blesse », διδράσκω, « je cours », etc. Dans Homère, σκω s’ajoute indifféremment à tous les verbes. Voir, par ex., Odyssée, XVII, 331 et 335, XVIII, 324, etc. Cette même désinence se trouve aussi en sanscrit, mais elle n’a pas davantage le sens inchoatif.
- ↑ Il y a une différence de quantité, le suffixe tor ayant eu primitivement, selon l’occurrence, o long ou o bref. Cf. en grec ῥήτωρ, ῥήτορος.