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Page:Braddon - Aurora Floyd, 1872, tome II.djvu/108

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AURORA FLOYD

criait d’arrêter. Il se retourna et vit l’idiot qui arrivait. De tous les êtres humains, à l’exception peut-être de celui qui était maintenant étendu sans vie dans la petite chambre du cottage, cet Hargraves était la dernière personne qu’il lui plût de rencontrer ; aussi se tourna-t-il du côté de l’idiot avec un froncement de sourcils. Ce dernier essuyait la sueur de son visage avec le bout de sa cravate déguenillée, et il était haletant.

— Qu’y a-t-il ? demanda John. Que me voulez-vous ?

— C’est le coroner, articula Hargraves, — le coroner et M. Lofthouse, le vicaire. Ils veulent vous parler, monsieur ; ils sont encore au Lion d’Or.

— De quoi s’agit-il ?

Hargraves fit une grimace sinistre.

— Je ne sais pas, monsieur, dit-il. Il n’est guère vraisemblable qu’ils aient voulu me le dire. Il y a quelque chose, quoique ça ; car M. Lofthouse était blanc comme un linceul, et il paraissait tout bouleversé ; on m’a envoyé pour vous dire de venir.

— Oui !… oui… j’y vais, — répondit John vaguement.

Il avait ôté son chapeau et passait sa main sur son front, comme un homme préoccupé. Il tourna le dos à l’idiot, et se remit en route dans la direction du Lion d’Or.

Hargraves le regarda s’éloigner jusqu’à ce qu’il eût disparu ; puis il se dirigea lentement vers le tourniquet du sentier conduisant dans le bois.

— Je sais ce qu’ils ont découvert, — se dit-il, — et je sais aussi ce qu’ils lui veulent. Il sera absent pendant pas mal de temps ; ainsi donc je puis traverser le bois et aller la prévenir. Oui, — il se frottait les mains et faisait entendre un rire étouffé qui contournait son affreux visage et le rendait horrible à voir, — oui, il me sera bien doux de le lui dire.