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Page:Braddon - Aurora Floyd, 1872, tome II.djvu/119

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AURORA FLOYD

prudemment de quelques pouces à l’intérieur. Le chien se dressa en poussant un grognement, et parut sur le point de s’élancer sur la hideuse tête de l’homme qui faisait l’effet d’une gargouille sculptée en relief sur une construction gothique ; mais Aurora saisit l’animal par son collier et l’arrêta.

— Silence, Bow-wow, dit-elle ; là… là… mon vieux chien !

Elle le retenait encore d’une main ferme, le calmant de l’autre.

— Que voulez-vous ? — demanda-t-elle en se tournant vers Stephen avec un air de dédain glacial qui la faisait ressembler à la femme de Néron défiant ses faux accusateurs. — Que me voulez-vous ? Votre maître est mort et vous n’avez plus de prétexte pour venir ici. On vous a interdit l’entrée du château. Si une autre fois vous l’oubliez, je prierai M. Mellish de vous en faire souvenir.

Elle tenait sa main posée sur la fenêtre, et allait la fermer, quand Hargraves l’arrêta.

— Ne soyez pas si pressée, — dit-il ; — j’ai à vous parler. Je sors tout droit de l’enquête ; j’ai pensé que vous seriez bien aise de savoir ce qui s’y passe. Je suis venu d’amitié, bien que vous m’ayez une fois payé en coups de cravache.

Le cœur d’Aurora battait violemment dans sa poitrine oppressée. Ah ! quel rude service ce pauvre cœur avait fait dans ces derniers temps, quel fardeau de glace il avait porté, quelle horrible oppression de secret et de terreur avait pesé sur lui, brisant toute espérance, toute tranquillité d’esprit ! Une douleur causée par l’impatience et l’inquiétude qui torturaient son cœur la poussait à lui demander quel était le résultat de l’enquête, afin de recevoir de ses lèvres sa sentence de vie ou de mort. Elle ignorait ce que cet homme avait découvert de son secret, mais elle savait qu’il la haïssait et qu’il se doutait bien qu’elle connaissait le pouvoir qu’il avait de la torturer.

Elle leva sa tête hautaine et jeta sur lui un regard de défiance.

— Je vous ai dit que votre présence m’est désagréable,