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Page:Braddon - Aurora Floyd, 1872, tome II.djvu/120

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AURORA FLOYD

dit-elle ; — allez-vous-en, et laissez-moi fermer la fenêtre.

L’idiot souriait avec impudence, et, retenant le battant de la fenêtre dans sa large main, il introduisit sa tête dans la chambre. Aurora se leva pour s’éloigner, mais il mit son autre main sur son bras, qui trembla instinctivement au contact de cette main calleuse et sale.

— Je vous dis que j’ai quelque chose de particulier à vous apprendre, — dit-il ; — vous l’entendrez jusqu’au bout. J’étais un des témoins de l’enquête ; j’y suis resté jusqu’à la fin, et même plus tard ; je sais tout.

Aurora recula sa tête avec dégoût, et essaya de dégager son bras.

― Laissez-moi, dit-elle. — Vous payerez cette insolence quand M. Mellish sera de retour.

— Oh ! il ne sera pas ici de sitôt, — dit l’idiot avec un ignoble sourire. — Il est retourné au Lion d’Or Le coroner et M. Lofthouse l’ont envoyé chercher pour lui dire quelque chose… quelque chose qui vous concerne ! — souffla Hargraves de ses lèvres pâles et sèches à l’oreille d’Aurora.

— Que voulez-vous dire ? — s’écria Mme Mellish, toujours retenue par l’étreinte de Stephen et toujours empêchant son chien de s’élancer sur lui, que voulez-vous dire ?

— Je veux dire ce que je veux dire, — répondit Hargraves ; — je veux dire que tout est découvert. Ils savent tout, et ils ont envoyé chercher M. Mellish pour le lui dire. Ils l’ont envoyé chercher pour lui dire ce que vous étiez à cet homme qui est mort.

Un faible cri s’échappa des lèvres d’Aurora. Elle s’était peut-être attendue à entendre cela, du moins elle l’avait redouté ; elle n’avait résisté que pour ne pas l’apprendre des lèvres de cet homme ; mais il l’avait vaincue, comme les natures sournoises, entêtées, si viles qu’elles soient, vaincront toujours les âmes généreuses et impressionnables. Il s’était vengé et avait réussi à être témoin de ses angoisses. Il laissa aller sa main en finissant de parler, et il la