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Page:Braddon - Aurora Floyd, 1872, tome II.djvu/154

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AURORA FLOYD

— Combien de gens connaissent ce secret, Aurora ? — demanda-t-il.

— Je ne puis vous le dire : mais je crains qu’il ne soit généralement connu, — répondit Mme Mellish, en frémissant au souvenir de l’insolence de l’idiot. — J’ai entendu parler d’une découverte faite par un des garçons d’écurie, un homme qui me hait… un homme que… avec lequel j’ai eu une altercation.

— N’avez-vous aucune idée de la personne qui a tiré sur ce Conyers ?

— Non, pas la moindre.

— Vous ne soupçonnez même pas quelqu’un ?

— Non.

Talbot fit quelques tours de plus dans la petite chambre, dans un trouble évident et une grande perplexité d’esprit. Il quitta enfin la chambre, et appela au pied de l’escalier :

— Lucy, ma chère, venez voir votre cousine.

Je crains fort que Mme Bulstrode ne se fût mise aux aguets, quelque part près du salon, car elle vola au bas de l’escalier, au son de la voix forte, et fut à côté de son mari deux ou trois secondes après qu’il l’eut appelée.

— Ô Talbot, — dit-elle, — que vous avez été long ! Je pensais que vous ne m’appelleriez jamais. Qu’est-ce qui est arrivé à la pauvre chérie ?

— Entrez et allez la consoler, ma chère, — dit Bulstrode gravement. — Elle a eu assez de chagrin, le ciel le sait, la pauvre enfant ! Ne lui faites point de questions, Lucy : mais consolez-la aussi bien que vous le pourrez, et donnez-lui la meilleure chambre que vous trouverez ; elle demeurera avec nous aussi longtemps qu’elle restera à Londres.

— Cher !… cher Talbot, — murmura la jeune femme reconnaissante. — Que vous êtes bon !

— Allons ! — dit Bulstrode ; — elle a besoin d’amis, Lucy ; et Dieu le sait, je veux agir en frère avec elle, fidèlement et bravement. Oui, bravement, — ajouta-t-il en relevant la tête avec un geste de défi, tandis qu’il montait lentement les escaliers.

Quel était le sombre nuage qu’il voyait monter si fatale-