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Page:Braddon - Aurora Floyd, 1872, tome II.djvu/166

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AURORA FLOYD

rement expié ma faute. J’ai reçu quelques mois après mon retour un journal qui contenait un récit détaillé de la mort de Conyers. Ce récit n’était pas exact, car cet homme avait été sauvé ; et quand j’épousai John, mon premier mari vivait encore.

Floyd laissa échapper un cri de désespoir et se leva à demi de son fauteuil ; mais Aurora s’était jetée à genoux devant lui, elle l’entourait de ses bras, le calmait et le consolait.

— Tout est fini maintenant, cher père, — dit-elle, tout est fini ; cet homme est mort. Je te dirai tout à l’heure comment il est mort… Tout est fini ; John sait tout, et nous devons nous marier de nouveau. Talbot dit que cela est indispensable, parce que notre mariage n’est pas légal. Mon père bien-aimé ! il ne doit plus y avoir de secrets, plus de malheur, rien que de l’amour, du calme, et une union parfaite pour nous tous.

Elle fit alors au vieillard le récit de la mort de l’entraîneur, s’appesantissant peu sur les détails et passant sous silence ce qu’elle-même avait fait ce soir-là, si ce n’est qu’elle s’était trouvée dans le bois au moment du meurtre, et qu’elle avait entendu la détonation d’un pistolet.

Ce n’était pas un récit agréable que celui d’un meurtre, de violences, de trahisons accomplies, pour ainsi dire, à l’ombre de la demeure de sa fille. Malgré l’assurance que lui donnait Aurora que toute douleur était passée, que le doute et l’incertitude devaient faire place au calme et à la sécurité, Floyd ne pouvait maîtriser ce sentiment. Il était, malgré lui, inquiet et mal à l’aise. Il emmena John sur la terrasse qu’inondait le soleil, pendant qu’Aurora dormait étendue sur un sofa du grand salon, et, tout en allant et venant, il l’entretint de la mort de l’entraîneur. Il ne tira rien du jeune campagnard qui pût jeter quelque lumière sur la catastrophe, et Floyd tenta vainement de deviner le mot de cette sombre énigme.

— Pensez-vous que quelqu’un ait pu avoir des motifs pour se débarrasser de cet homme ? — demanda le banquier.