Aller au contenu

Page:Braddon - Aurora Floyd, 1872, tome II.djvu/220

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
216
AURORA FLOYD

tion m’aurait dit que je l’avais bassement injuriée. Vous ne commettrez pas l’erreur que j’ai commise, John. Vous devez aller franchement et sans crainte vers la femme que vous aimez, vous lui direz le soupçon qui obscurcit sa réputation, et vous lui demanderez de vous aider de tout son pouvoir à démêler le mystère de la mort de cet homme. L’assassin, il faut qu’il se trouve, John ; car aussi longtemps qu’il restera inconnu, vous et votre femme vous serez les victimes de chaque griffonneur à un penny la ligne qui se trouvera aux abois pour un article.

— Oui, — répondit amèrement Mellish, — les journaux ont déjà été durs pour cela ; et il y a eu un drôle qui a rôdé par ici dans ces derniers jours que j’avais une forte envie de rosser. Quelque journaliste sans doute qui vient prendre des informations.

— Je le suppose aussi, — répondit Talbot pensivement. — Quelle espèce d’homme était-ce ?

— Un individu d’assez bonne façon, mais de Londres, j’imagine, et… Arrêtez, — s’écria subitement John, — voici un homme qui vient vers nous du côté du tourniquet, et à moins que je ne me trompe, c’est ce même individu.

Mellish avait raison.

Le bois était libre pour quiconque voulait jouir de l’abri bienfaisant des hêtres et marcher sur le tapis uni d’un terrain mousseux plutôt que de suivre péniblement la grand’route poudreuse.

L’étranger qui s’avançait du côté du tourniquet avait bonne façon, il avait un habit noir boutonné jusqu’au menton. Il regarda Talbot et John en passant près d’eux, pas insolemment ni même d’une manière méfiante, mais avec un regard brillant et un coup d’œil pénétrant, qui semblait saisir dans la même minute les détails les plus saillants de l’aspect extérieur des deux gentlemen. Puis, faisant quelques pas, il s’arrêta et regarda pensivement l’étang et le banc.

— C’est là la place, je crois, messieurs ? — dit-il d’une manière franche et assez délibérée.

Talbot le regarda avec intérêt.