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Page:Braddon - Aurora Floyd, 1872, tome II.djvu/246

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AURORA FLOYD

férente, et par là attestait lui-même qu’il avait appartenu à un autre maître. Il y avait un newmarket de Mellish et une culotte de chasse, que le grand Poole avait seul pu faire, usée aux genoux, mais autrement pas trop mauvaise pour être portée. Il y avait une jaquette en toile et un vieil habit de livrée ayant appartenu à un des domestiques du Park ; des revers de bottes dépareillés, de toutes les formes connues, depuis le blanc sans tache, à la délicate couleur crème de Champagne des dandys, jusqu’à la teinte vinaigre favorite des hardis hobereaux de campagne ; un chapeau de groom avec un galon terni et un fond ébréché ; des souliers à clous qui avaient dû appartenir à Dawson, des culottes de velours à côtes qui n’avaient pu servir qu’à un gardien de maison de fous, mort il y a longtemps ; il y avait un habit qui portait l’horrible empreinte d’une terrible action commise depuis peu. C’était l’habit de chasse en velours porté par Conyers, l’entraîneur, qui, percé par la balle meurtrière et inondé par un torrent de sang, avait été pris par Hargraves dans la confusion de la catastrophe. Toutes ces choses, avec divers débris, tels que des éperons et des manches de fouets, des morceaux de harnais cassés, des bouts de cordes et autres saletés que la misère seule aime à accumuler, étaient empaquetées dans une lourde malle couverte d’une peau galeuse, et protégée par une douzaine de mètres de cordes nouées, lacées et ficelées ensemble d’une manière que l’idiot avait considérée comme suffisante pour défier le plus habile voleur de la chrétienté.

Grimstone n’avait pas eu beaucoup de peine à briser cette fermeture de nœuds, et avait fouillé la malle de fond en comble ; il avait même examiné de près la serrure, il avait tâté chaque tête de clou en cuivre pour s’assurer si l’un d’eux avait été touché ou enlevé. Il croyait possible que deux mille livres de la banque d’Angleterre eussent été clouées sous la peau galeuse. Il poussa un profond soupir quand il eut achevé son inspection, remit les habits un à un dans la malle, renoua la corde usée, et avec un soupir plus profond encore, il tourna le dos à la chambre de l’idiot.

— Ce n’est pas bon, — pensa-t-il, — le gilet à raies