Page:Braddon - Henry Dunbar, 1869, tome I.djvu/114

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
110
HENRY DUNBAR

Mme Madden la comprit parfaitement et elle adressa au jeune homme un sourire approbateur.

Arthur était le favori de la nourrice de Laura. Elle savait qu’il adorait sa jeune maîtresse et elle le regardait comme le modèle de tout ce qui est noble et chevaleresque.

Elle se mit à remuer le service à thé en argent, puis elle regarda Dora d’un air significatif. Mais Mlle Macmahon ne comprit pas ce coup d’œil éloquent. Ses yeux noirs, ses beaux yeux noirs graves et d’une expression douce et pensive, étaient fixés sur les deux jeunes visages dans l’embrasure de la fenêtre. Celui de Laura était troublé par une douloureuse perplexité, celui du jeune homme exprimait éloquemment une tendresse infinie. Dora rougissait et pâlissait en contemplant ce groupe, et elle tournait machinalement les pages de son livre d’une main légèrement tremblante.

— Votre nouveau chapeau arrive ce matin, mademoiselle Dora, — dit Élisabeth d’un ton assez sec. — Ne voulez-vous pas monter le voir ?

— Mon nouveau chapeau ? — dit Dora d’un ton rêveur.

— Sans doute, mademoiselle ; le nouveau chapeau que vous avez acheté hier dans Regent Street. Je n’ai jamais vu de ma vie une personne plus distraite que vous ce matin, mademoiselle Dora.

La jeune fille se leva, étonnée du zèle que Mme Madden déployait à propos de son chapeau. Mais elle quitta la chambre et suivit la vieille gouvernante qui savait se faire obéir de la folle héritière de Maudesley Abbey elle-même, et Laura resta seule avec le jeune avoué.

Laura avait repris sa place auprès de la fenêtre. Son coude était appuyé sur le bras rembourré du fauteuil et sa main supportait sa tête. Ses yeux étaient fixés droit devant elle et leur regard avait une expression pensive