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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

dis. » Joseph accepta cette offre, malgré toutes les remontrances de ma pauvre mère et les miennes. Il s’en alla vivre avec le cornette au mois de janvier de l’année où les fausses traites furent présentées à notre caisse.

— Et à quelle époque ces traites furent-elles présentées ?

— Pas avant le mois d’août suivant, monsieur. Il paraît que M. Henry perdit cinq ou six mille livres au Derby. Il soutira à son père autant d’argent qu’il put pour couvrir ses pertes, mais il ne réunit que trois mille livres. Il alla donc trouver Joseph dans une situation d’esprit déplorable, lui déclara qu’il parviendrait à arracher à son père la somme qu’il lui fallait dans un mois environ, et que s’il pouvait, pour le quart d’heure, inventer quelque chose qui lui permît de conserver son crédit et de payer les parieurs de la Cité qui le tourmentaient, il arrangerait tout par la suite. Puis enfin, il avoua peu à peu qu’il avait besoin du secours de mon frère, très-habile à imiter les écritures, pour contrefaire la signature de lord Vanlorme. « Je reprendrai mes billets avant l’échange, Joseph, dit-il ; ce n’est qu’un petit expédient pour faire face aux exigences du moment. » Hélas ! messieurs, le pauvre enfant imprudent aimait beaucoup son maître et il consentit à faire le mal.

— Pensez-vous que ce fût la première fois que votre frère eût fait un faux ?

— Je le pense, monsieur. Souvenez-vous qu’il était tout jeune et que très-probablement il trouvait charmant de venir en aide à son jeune et généreux maître. Je l’avais vu plusieurs fois imiter la signature de la maison et d’autres signatures sur une demi-feuille de papier à lettre, tout simplement pour plaisanter : mais je ne crois pas que mon frère Joseph eût fait une action déshonnête avant de fabriquer ces billets. À quoi bon ! il avait à peine dix-huit ans !