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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

Je serais parti hier par le même train sans ce terrible événement.

Arthur le regarda tout étonné.

— Vous êtes surpris, — dit Dunbar.

— Je pensais que peut-être vous resteriez ici… jusqu’à ce que…

— Jusqu’à ce que quoi ? — demanda l’Anglo-Indien. — Tout n’est-il pas fini ? L’enquête a été terminée aujourd’hui. Je laisserai des ordres pour l’enterrement du pauvre diable et la somme nécessaire pour ses funérailles. J’ai parlé de cela au coroner cette après-midi. Que puis-je faire de plus ?

— Rien… certainement, — répondit Arthur avec quelque hésitation ; — mais je croyais que, vu la singularité du cas, il serait préférable que vous restassiez sur les lieux, si cela est possible, jusqu’à ce qu’on ait fait quelques démarches pour découvrir l’assassin.

Il ne voulut pas exprimer la pensée qu’il avait à l’esprit, car il songeait que quelques personnes pourraient soupçonner Dunbar lui-même et qu’il valait mieux pour lui ne pas s’éloigner du théâtre du meurtre jusqu’à ce que tout soupçon fût effacé par l’arrestation du meurtrier véritable.

Le banquier secoua la tête.

— Je doute fort qu’on arrête le coupable, — dit-il. — Qu’est-ce qui l’empêche de s’échapper ?

— Tout, — répondit Lovell avec chaleur. — D’abord la stupidité du crime, la folie aveugle que trahit si souvent le meurtrier. Ce n’est pas seulement l’acte coupable en lui-même qui est horrible ; songez à l’état épouvantable de l’esprit de l’assassin après la perpétration du crime. Et c’est en un pareil moment, aussitôt après que ce crime a été commis, alors que le meurtrier est torturé par le remords, qu’il faut qu’il déploie le plus de circonspection : qu’il surveille ses regards, ses moindres paroles, ses actions les plus